PHILIPPINES
Leila M. de Lima est une juriste et militante des droits de l’homme philippine. Entre 2008 et 2010, elle a été présidente de la Commission des droits de l’homme des Philippines, puis ministre de la Justice entre 2010 et 2015, avant d’être sénatrice entre 2016 et 2022. C’est dans le cadre de cette activité que Leila M. de Lima a ouvert une enquête sur les exécutions extrajudiciaires liées à la « guerre contre la drogue » lancée par l’ex-président philippin Rodrigo Duterte après son entrée en fonctions en 2016. En tant que présidente de la Commission des droits de l’homme des Philippines, elle a également lancé une enquête sur l’implication de Duterte dans des exécutions extrajudiciaires à l’époque où il était maire de Davao City. Elle est ainsi devenue l’une des critiques les plus féroces et les plus virulentes de l’ancien président philippin. Elle a été arrêtée dès février 2017 sur la base d’accusations montées de toutes pièces et motivées par des considérations politiques et se trouve depuis en prison. Sa détention a empêché Leila M. de Lima d’assurer pleinement son mandat de sénatrice et son travail de défenseure des droits de l’homme, faute de pouvoir participer aux séances du Sénat ou voter les lois. Elle n’a pas été réélue en 2022 et entend poursuivre son activité de défense des droits de l’homme à titre personnel et comme avocate dès qu’elle aura recouvré sa liberté. En mai 2022, deux témoins clés se sont rétractés dans le cadre de la procédure menée à son encontre.
CURRICULUM
Leila M. de Lima est une juriste et militante des droits de l’homme philippine. Entre 2008 et 2010, elle a été présidente de la Commission des droits de l’homme des Philippines, puis ministre de la Justice entre 2010 et 2015, avant d’être sénatrice entre 2016 et 2022. C’est dans le cadre de cette activité que Leila M. de Lima a ouvert une enquête sur les exécutions extrajudiciaires liées à la « guerre contre la drogue » lancée par l’ex-président philippin Rodrigo Duterte après son entrée en fonctions en 2016. En tant que présidente de la Commission des droits de l’homme des Philippines, elle a également lancé une enquête sur l’implication de Duterte dans des exécutions extrajudiciaires à l’époque où il était maire de Davao City. Elle est ainsi devenue l’une des critiques les plus féroces et les plus virulentes de l’ancien président philippin. Elle a été arrêtée dès février 2017 sur la base d’accusations montées de toutes pièces et motivées par des considérations politiques et se trouve depuis en prison. Sa détention a empêché Leila M. de Lima d’assurer pleinement son mandat de sénatrice et son travail de défenseure des droits de l’homme, faute de pouvoir participer aux séances du Sénat ou voter les lois. Elle n’a pas été réélue en 2022 et entend poursuivre son activité de défense des droits de l’homme à titre personnel et comme avocate dès qu’elle aura recouvré sa liberté. En mai 2022, deux témoins clés se sont rétractés dans le cadre de la procédure menée à son encontre.
Vous êtes emprisonnée depuis février 2017 sur la base d’accusations inventées de toutes pièces. Comment votre dossier a-t-il évolué ?
Je suis désormais plus optimiste. Je crois qu’à la fin du mandat de Duterte, les pressions exercées sur les juges et sur le ministère de la Justice cesseront et que le nouveau gouvernement ne soulèvera plus ces griefs fantaisistes contre moi. C’est ce que j’attendais et j’ai l’espoir d’être relâchée. J’ai déposé une nouvelle demande de libération sous caution quand un témoin important a retiré sa déposition contre moi. Outre ce témoin, deux autres personnes ont également avoué avoir été contraintes par des agents du gouvernement à faire de faux témoignages à charge.
Cette évolution donne un élan considérable à l’une des deux affaires me visant, ces faux témoignages étant le seul trait d’union avec les accusations fictives et, en même temps, le principal élément de preuve sur lequel se fonde la Cour. En ce qui concerne la seconde procédure, presque tous les témoins clés sont des délinquants condamnés et incarcérés dans la prison d’État. Ils persistent à témoigner contre moi, soit parce qu’ils font l’objet de menaces, soit en échange de pots-de-vin, mais cela ne durera que tant que Duterte est encore président. Je m’attends à ce que les témoins ne soient plus disposés à comparaître. Et quand bien même ils le feraient, j’espère qu’ils se rétracteront. La vérité, qui est que Duterte et ses hommes de main ont tout inventé, finira par éclater.
« À l’instant où nous cessons de nous battre, nous perdons nos valeurs démocratiques et les droits de l’homme. »
Depuis votre incarcération, avez-vous bénéficié d’une aide juridique pour former un recours ?
Cela fait cinq ans que je me fie uniquement à ma propre équipe d’avocats pour l’aide juridique. J’ai cependant bien conscience que les manifestations de solidarité et de soutien de sénateurs américains, de membres du Congrès, de parlementaires d’autres pays, du Parlement européen, d’organisations internationales de défense des droits de l’homme, d’organisations non gouvernementales, de fondations telles que la Fondation Friedrich-Naumann pour la liberté et d’autres groupes et individus ont une grande influence sur ma situation. Même si elles ne semblent pas avoir eu d’effet sur l’ancien gouvernement de Duterte et les juges, elles rappellent en permanence à la population philippine que le monde continue de surveiller de près les Philippines et de se préoccuper de la situation des droits de l’homme dans notre pays.
Fin mai 2022, le nouveau secrétaire d’État du ministère de la Justice du nouveau gouvernement Marcos a déclaré aux médias qu’il était disposé à réexaminer mon cas, en soulignant que la rétractation de plusieurs témoins suggérait un dysfonctionnement dans mes procès. Pour l’heure, je vais me fier à sa parole et espérer qu’il réexaminera personnellement mes dossiers.
Que pensez-vous du travail mené par les avocates et les avocats en matière de droits de l’homme aux Philippines ?
Il n’y a que très peu d’avocates et d’avocats qui travaillent dans les droits de l’homme ici, car c’est une activité risquée et peu intéressante financièrement par rapport à d’autres domaines du droit. Le principal problème pour les avocats spécialisés dans la défense des droits de l’homme est ce que l’on appelle le « red tagging » (la « chasse aux rouges »), dans le cadre duquel ils sont identifiés en tant que partenaires idéologiques de leurs clients. Ceux-ci sont généralement des activistes à qui l’État colle l’étiquette de « communistes » ou de sympathisants. Même si ces clients n’appartiennent à aucun mouvement politique et ne sont que des membres tout à fait ordinaires de la communauté, leurs avocats sont harcelés. Un autre problème aux Philippines tient à l’indifférence générale, sinon à la franche hostilité de la population à l’égard des droits de l’homme, que vient encore renforcer la propagande encouragée par l’État sur les réseaux sociaux. Mais le problème numéro un reste la faiblesse du système judiciaire philippin, vulnérable aux changements politiques. C’est mon expérience personnelle qui m’amène à ce constat. J’ai été persécutée et incarcérée par la machine gouvernementale dans son ensemble pour le simple fait d’avoir osé demander la fin de la guerre meurtrière contre la drogue menée par Duterte.
Mon message aux avocates et avocats du monde entier est simple :
Tenez bon ! Les avocates et les avocats doivent être en première ligne de la lutte pour les droits de l’homme et se battre contre les atteintes à ces derniers. À l’instant où nous cessons de nous battre, nous perdons nos valeurs démocratiques et les droits de l’homme.
Philippinen